Lecture d’oeuvres
Antibes
Antibes
Je suis sensible au bonheur de vivre, à la lumière éclatante de cette scène, à la beauté de ces corps de femmes en train de prendre le soleil. Tout est simple ici, il n'y a que l'eau, le soleil, la mer, et le plaisir d'en jouir, de faire partie de ce paysage simplifié.<br /> Pour que l'on puisse ressentir cela, participer à ce bonheur, apprécier cette scène, il a fallu que le peintre nous la résume avec un art de la composition magistral, d'abord en choisissant cette image et en l'isolant de son contexte, ensuite en imposant au premier plan, et sur presque la moitié de la surface de l'œuvre, pour stabiliser l'œil du spectateur, la blancheur de la proue du bateau.<br /> Le moment est à la fois éternel et fugace, et cette fugacité s'exprime par le travail rapide, c'est presque une ébauche, les coups de pinceaux sont nerveux, la facture est celle des fauves, et avec cela tout est juste, chaque trait a sa raison d'être, et les jeunes femmes, dans leurs poses classiques, sont à la fois réelles, vivantes, contemporaines (Parisiennes en vacances, bronzées et insolentes) - et des archétypes de baigneuses. J'admire aussi la simplicité si juste avec laquelle la mer est représentée, quelques traits verts et bleus, et le tour est joué, on y croit.</p> <p>Mais comme toujours avec la Méditerranée, la violence des contrastes, l'éblouissement de la lumière, le mystère de la mer, et peut-être la pose hiératique des personnages, laissent planer, à peine perceptible dans cette œuvre dédiée au bonheur et à la légèreté, et pourtant présente à l'arrière plan, la possibilité de la tragédie.
Claire Charpentier
Artiste peintre