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De l’importance du chien dans l’œuvre de Lagorre

  /  De l’importance du chien dans l’œuvre de Lagorre

Quand l’homme figure sur la toile, le chien n’est jamais loin.

Les jours de foire à Seix, désinvolte, il traverse la rue en toute décontraction car, pour lui, ce jour là est un jour de repos. Bien souvent, dans les pas du berger, il parcourt la montagne, guidant le troupeau, guettant et surveillant le moindre prédateur, aidant sans relâche son maître. Le soir venu, le chien pénètre dans la cabane, se couche sous la table, non loin de l’âtre, au plus près du berger, après avoir mangé. Sur les toiles de Lagorre, ce chien là est omniprésent. Il prend souvent l’aspect d’un chien bâtard dont la couleur indéterminée, parfois sable ou fauve, n’est pas sans rappeler celle des chiens errants du Sud Maroc mais au final, c’est surtout un chien midi-pyrénéen, de ceux qui, lorsqu’ils ont trop chaud, une fois de retour dans la vallée, s’étalent de tout leur long en travers de la route, sans scrupules aucuns.

Sur les tableaux de Lagorre figurent aussi des chiens plus faméliques mais tout aussi fidèles, ceux qui suivent l’errance des gitans dans leurs roulottes et qui, quand le convoi s’arrête, semblent comme leurs maîtres, écouter, attentifs, les sons de la guitare qui s’égrènent dans la nuit …

Mais il est d’autres chiens, plus maniérés ceux là, qui figurent, eux aussi, sur les toiles du peintre.

Ainsi , quand David contemple Bethsabée, il tient en laisse un lévrier royal dont l’allure altière, la position, la couleur noire, tranchent radicalement avec l’allure des chiens de berger. N’en doutons pas, Lagorre sait l’importance et le véritable culte que voue l’Islam aux lévriers, chiens à caractère noble et hautain, seuls capables de pratiquer avec succès, au vu de leur légendaire rapidité, la chasse aux gazelles dans le désert, chien royaux et adulés …

Et puis, il y a aussi ces autres petits chiens, semblables à des caniches, qui s’adonnent à mille facéties. C’est eux qu’on voit au cirque, en compagnie des clowns, sautiller sur la piste et entamer une danse pour amuser les enfants. Eux encore qui imitent leur maîtresse, se déguisant comme elle, quand il sont à Venise où on les aperçoit, affublés d’un chapeau et d’un nœud papillon, participant au bal et à la mascarade. Lagorre pratique l’anthropomorphisme.

Plus surprenant encore, voilà ce chien qui, sur la plage de galets, du côté d’Étretat se met à aboyer face au nageur, le voilà maintenant qui s’immisce sur la toile au milieu des baigneuses sur les rives de l’Esbintz ; on le retrouve parfois sur un bateau de pêche, en pleine mer, du côté de Peñiscola et il arrive aussi qu’on le voie fureter sur les quais du vieux port, à Cannes, en compagnie de marins , tous prêts à embarquer…

Point n’est besoin d’insister davantage. Au fil des toiles de Lagorre, le chien acquiert un véritable statut.

Cette omniprésence du chien dénote les réminiscences d’un passé qui refait surface. Celui d’une adolescence vécue dans les hautes vallées du Couserans en compagnie de bergers qu’il a si souvent peints, avec lesquels il a si souvent dialogué et pour lesquels le chien reste le compagnon de tous les instants, celui qui rompt leur solitude quand le soir venu, l’homme se retrouve seul sous la voûte étoilée à garder les brebis. Le chien, ami et complice à la fois.

Souvenirs également de voyages au Maghreb, en Espagne ou en Italie…

Où qu’ils se trouvent, les chiens ressemblent à leur maître.

Peint avec un réalisme expressif très marqué qui témoigne de la relation qui unit l’homme et l’animal, dès les premiers tableaux (en 1934 !), le chien est une constante dans l’œuvre de Lagorre. Il concrétise l’interaction qui s’est bâtie au fil du temps entre l’homme et l’animal. Mais le chien n’est pas seulement ici symbole d’endurance à la tâche, de fidélité , de loyauté envers son maître, il n’est pas que l’ami des enfants et des femmes, joyeux et amusant, agissant avec légèreté sur la piste de cirque ou lors du carnaval, le chien dans l’œuvre de Lagorre est totalement humanisé. L’animal chez Lagorre est doté d’un vrai caractère, comme chez Cervantès – si nous songeons à Rossinante et peut-être plus encore au baudet de Sancho ! -, le chien, sur les toiles de Lagorre, apparaît comme un véritable double de son maître.

Toute sa vie durant, les chiens auront accompagné l’artiste dans l’intégralité de son œuvre figurative.