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Louis Carsalade, instituteur et écrivain

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Parmi les meilleurs et les plus fidèles amis de Lagorre figure sans conteste Louis Carsalade. Lagorre l’a connu très tôt puisqu’il l’a rencontré à Saint-Laurent-sur-Save, dès l’après-guerre.

« Nous avons fait sa connaissance en 1945, alors qu’il peignait au Foyer populaire de Saint-Laurent, sa grande toile des Martyrs de Meilhan … A la fin de l’année scolaire, en juillet 1946, il avait, d’un coup de patte inégalé, transformé en œuvre d’art les stands de cette kermesse du renouveau qui fut, sur les bords de la Save, la première manifestation d’allégresse de l’après-guerre »1

Louis Carsalade est l’instituteur du village tandis que l’abbé Bernard Carrère, commanditaire du martyre de Saint-Laurent, en est le curé.

« Les maîtres, religieux ou laïques, conscients de la convergence de leur mission, s’abstenaient entre eux de toute hostilité et, à défaut de rapports cordiaux, respectaient une sorte de pacte de non agression…Tout comme monsieur le curé, l’école publique rurale jouissait d’un incontestable prestige. Elle représentait aux yeux des populations une sorte de temple du savoir, l’image même de la promotion sociale.»2

Louis Carsalade, ancien hussard de la République, avait su innover dans l’école communale où il enseigna avec son épouse de 1945 à 1957. Lagorre, lui même profondément reconnaissant envers monsieur Palmade, l’instituteur de Seix qui avait pressenti son talent artistique et qui l’avait encouragé dans cette voie lui permettant décrocher une bourse afin qu’il puisse accéder aux Beaux Arts de Toulouse, ne pouvait qu’être sensible à l’esprit d’ouverture de Louis Carsalade, cet instituteur rural qui, lui aussi, défendait bec et ongles l’école républicaine.

« Nos contacts s’étaient espacés. Il avait poursuivi sa voie d’artiste, voyagé, travaillé, exposé à Toulouse. De notre côté nous avions mené notre mission d’enseignants, élevé une famille. On le revoyait de temps en temps ; à Saint-Laurent d’abord, à l’occasion de quelque célébration religieuse avec nos cardinaux Saliège ou Garrone, quelquefois à Toulouse, à l’une de ses expositions... »

Les deux hommes vont pourtant se retrouver.

Humaniste, homme de culture et de réflexion, Louis Carsalade se révèle être un historien soucieux de la conservation du patrimoine au point qu’il créera, en 1977, l’association patrimoniale « Savès-Patrimoine ». Historien nourri de textes anciens, Louis Carsalade rédige alors plusieurs ouvrages sur le Comminges.

« Comment nous sommes-nous retrouvés ? Sans doute à cause de l’inondation de 1977 qui avait détruit les bâtiments de l’ancien couvent. Poussé par les événements, j’avais été conduit à écrire son histoire et je m’étais intéressé à l’église paroissiale, témoignage obstiné du monastère masculin. J’avais regardé de plus près les peintures et conçu le projet d’en parler dans mon futur ouvrage.  Une visite au peintre s’imposait et c’est pourquoi, à l’été 1990, j’allai le voir à Seix où il exposait. Il me reçut avec gentillesse et, après qu’il m’eut présenté ses œuvres, il m’invita au restaurant.»

Emerveillé par le travail de Lagorre dans l’église de Saint-Laurent-sur-Save puis à la mairie de l’Isle-en-Dodon, Louis Carsalade décide d’écrire un ouvrage sur ce qu’il connaît du parcours artistique de Lagorre. René Gaston-Lagorre en est très honoré. Les deux hommes se revoient.

« Chaque rencontre nous rapprocha. Je découvrais la personnalité et la supériorité d’un homme vrai, généreux et sensible, peu soucieux de paraître ou d’exercer un quelconque magistère, entièrement tourné vers son art, indulgent pour autrui, exigeant pour lui-même, ayant pour religion la recherche du vrai et du bien… »

Une relation épistolaire dense et empreinte d’amitié s’en suit. Cet abondant et incessant échange de courriers entre les deux hommes s’avère d’autant plus précieux que le peintre y parle librement de sa façon de travailler, de ses goûts artistiques, et qu’il y livre sans détour ses réflexions sur la peinture. Lagorre accueille Louis Carsalade à Seix en 2001 pour fêter la sortie du livre intitulé Lagorre en Haute-Save.

Dans ce livre dédié au peintre, Louis Carsalade reproduira des passages entiers des échanges épistolaires qui ont précédé la parution du livre, les consignant avec minutie. Louis Carsalade est donc l’ami en même temps que le témoin incontournable de la vie artistique de Lagorre.

Il nourrit une telle admiration pour le parcours du peintre qu’il lui dédiera même un poème en forme d’adieu.

D’aucuns trouveront peut-être ce sonnet, en forme de clin d’œil un tantinet naïf ? Ce serait méconnaître l’érudition de Louis Carsalade et la fine connaissance qu’il a de l’œuvre de Lagorre. Tandis que les quatrains évoquent les toiles de jeunesse, les tercets évoquent eux la peinture des « Z ». Le poème se déroule comme se déroule l’œuvre, jusqu’au « Z » final. Cet hommage témoigne assez de l’affection que vouait Louis Carsalade à son ami René Lagorre.

Comme son ami, Louis Carsalade est mort à l’âge de 90 ans.

Un livre :

Louis Carsalade, Lagorre en Haute Save, Edité par Savès-Patrimoine/ Office municipal de l’Isle-en-Dodon, 2001.

et un sonnet :

 

René Lagorre

Conserve au fond de toi la Montagne d’Ariège

Que tu peignis jadis, fasciné par ses ours

Et ses bergers pensifs au regard de velours

Qui descendaient vers Seix à la première neige.

Et garde ton printemps : la noce et son cortège,

Le cerisier, témoin des précoces amours,

Le lilas qui fleurit, la moisson des beaux jours,

La baigneuse au teint mat que la pudeur protège.

Malgré le temps ingrat, malgré le cheveu gris,

D’un pinceau pur et vif, à présent tu décris

La fleur qu’on a coupée, la danse qui s’efface,

Éphémères grandeurs jaillies de ton cerveau.

Et tu t’en vas, fixant la minute qui passe

Sur le fugace éclair de ton rêve nouveau.

Louis Carsalade
1Louis Carsalade, Lagorre en Haute-Save, Association Savès-patrimoine, p.104.
2Louis Carsalade, op.cit., p.27.